Faut-il être "propre" pour faire l’amour ?

Ce que l’obsession de l’hygiène dit (vraiment) de nos sexualités.

"Je ne peux pas faire l’amour si je ne me suis pas douché·e."

Cette phrase, je l’entends régulièrement en consultation. Parfois exprimée avec humour, parfois comme une évidence. Il ne s’agit pas ici de remettre en question l’hygiène intime de base — elle est essentielle pour éviter infections et inconforts. Mais au-delà de cette hygiène corporelle élémentaire, que révèle notre besoin d’être “propre” à chaque étape de nos relations sexuelles ?

La sexualité serait-elle incompatible avec les odeurs, les fluides, la transpiration, les poils, les traces… bref, avec le corps tel qu’il est ?

Dans cet article, je vous propose de déconstruire ce que cache notre rapport à la propreté dans la sexualité. Pour mieux comprendre ce qu’il dit de nous, de nos héritages culturels… et pour, peut-être, nous autoriser à (re)vivre une sexualité plus libre et moins normée.

Soyez clair(e), ayez confiance et n’y réfléchissez pas trop. La beauté de votre histoire, c’est qu’elle va continuer à évoluer et que votre site peut évoluer avec elle. Votre objectif, c’est qu’il soit le reflet du moment présent. La suite s’écrira d’elle-même. C’est toujours ainsi.

Une bonne hygiène intime, oui… mais attention à l’excès

Commençons par le plus simple : oui, une toilette intime quotidienne, avec un savon doux, sans parfum et au pH neutre, est recommandée. Elle aide à prévenir les infections urinaires, mycoses ou irritations.

Mais attention à ne pas tomber dans le piège de l’hyper-nettoyage. Certaines pratiques comme les douches vaginales, les déodorants intimes ou les savons parfumés peuvent déséquilibrer la flore intime. Le vagin, par exemple, est un organe auto-nettoyant. Il n’a pas besoin d’être “purifié”.

Alors pourquoi cette course à la propreté ? Pourquoi ce besoin de se laver immédiatement avant — et après — un rapport sexuel ? Pourquoi certaines pratiques comme le sexe pendant les règles ou la réception des fluides sont-elles encore perçues comme “sales” ?

Ce que notre rapport à la propreté révèle (vraiment)

Se laver, s’épiler, refuser un cunnilingus ou éviter d’embrasser au réveil… Ce ne sont pas que des “préférences personnelles”. Bien souvent, ces comportements sont le reflet de normes sociales intériorisées, profondément ancrées dans notre histoire collective.

Comme l’écrit Mona Chollet dans Réinventer l’Amour :

“Nos goûts […] sont tributaires des préjugés et des représentations en circulation dans nos sociétés, dont nous sommes forcément imprégnés.”

Voici quelques exemples de normes invisibles mais bien réelles :

  • L’idée que les femmes doivent être parfaitement épilées pour être attirantes et “propres”.

  • Le dégoût encore très courant envers les rapports sexuels pendant les règles, considérés comme “malpropres”.

  • La croyance que les mycoses ou infections vaginales seraient le signe d’un manque d’hygiène.

  • Le rejet des fluides corporels (sperme, cyprine, sueur, sang menstruel) dans de nombreuses pratiques sexuelles.

Ces idées ne viennent pas de nulle part : elles sont le fruit de siècles de discours religieux, médicaux et patriarcaux qui ont associé la sexualité à l’impureté, au péché et à la honte.

Une longue histoire d’obsession pour la “pureté”

Déjà dans la Bible, le sexe est lié à la “souillure”. Le Livre du Lévitique parle des règles et des éjaculations comme de sources d’impureté, nécessitant purification et abstinence.

Avec le christianisme, le corps devient lieu de tentation. La sexualité est tolérée uniquement dans le mariage, à des fins de reproduction. Saint Augustin parle de “concupiscence boueuse”… Ambiance.

Plus tard, au XIXe siècle, c’est au tour de la médecine hygiéniste de s’emparer du sujet. Des médecins recommandent des ablutions précises avant et après les rapports, pour “préserver la dignité de l’acte”. Les fluides deviennent suspects, les corps sont à contrôler.

Aujourd’hui encore, sans même nous en rendre compte, nous avons hérité de cette vision du sexe “propre” ou “acceptable” — et nous évitons tout ce qui pourrait s’en écarter.

Et si on changeait de regard ?

Ce que j’observe en sexothérapie, c’est que ce besoin excessif de propreté peut créer de nombreuses inhibitions : honte de son odeur, rejet de certaines pratiques, difficulté à se laisser aller, peur du jugement…

Cela peut limiter considérablement le désir, le plaisir, l’intimité et la spontanéité dans la relation sexuelle.

Mais bonne nouvelle : nos goûts évoluent. Une fois qu’on comprend que nos “préférences” ont été influencées par des normes extérieures, on peut commencer à se les réapproprier. À les explorer avec curiosité, liberté… et peut-être même une pointe de légèreté.

En résumé : faut-il être “propre” pour faire l’amour ?

Oui, une hygiène de base est importante pour votre confort et votre santé.
Non, vous n’avez pas besoin d’être parfaitement épilé·e, inodore ou aseptisé·e pour être désirable ou digne d’une relation sexuelle.

La sexualité, c’est aussi lâcher prise, accepter le corps tel qu’il est, explorer ses envies sans honte ni filtre.

Et parfois, cela commence par questionner ce que nous considérons comme “sale”.

Vous avez envie d’en parler ? D’aller plus loin ?

En consultation, je vous accompagne pour remettre du plaisir, de la liberté et de la confiance dans votre intimité. Que vous soyez seul·e ou en couple, chaque séance est un espace pour explorer, comprendre et transformer votre rapport au corps, au désir, au plaisir.

📩 Pour prendre rendez-vous ou poser vos questions, c’est ici :

Clémence Rérolle
Sexologue clinicienne
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